« Vous allez nous enseigner la magie ? » répéta Delana, ses grands yeux bleus écarquillés par la surprise et l’émerveillement.
Tout aussi étonné, Glok restait la bouche ouverte et me fixait sans rien dire, ce qui ne lui ressemblait guère. Plusieurs années auparavant, j’avais recueilli la fillette humaine et le petit gobelin, tous deux orphelins, car j’avais détecté en eux de bonnes prédispositions à la magie. Il était temps à présent de débuter leur apprentissage.
« Mais oui, tu as bien entendu, ma chère. Enfin, seulement si cela vous intéresse, bien sûr », dis-je avec un air faussement détaché.
Ma pique eut l’effet escompté et les deux enfants laissèrent libre cours à leur enthousiasme pour me prouver leur motivation. Une fois leur concert de cris de joie terminé, le premier cours put commencer. Je leur expliquai que c’était de la terre que venait l’énergie magique, le mana, et qu’un sorcier devait apprendre à capter mentalement le mana environnant pour l’utiliser et lancer des sorts.
« Maître, c’est quoi un sort ? » demanda Glok.
Évidemment. Il fallait commencer par là.
« Eh bien... Pratiquer la magie, c’est un peu comme faire la cuisine. Il y a plein d’ingrédients dans la cuisine, mais pour les transformer en bons petits plats, vous devez connaître des recettes. Pour devenir magicien, vous devrez apprendre des sorts, grâce auxquels vous pourrez vous servir du mana pour faire toutes sortes de choses fantastiques. Certains sorts sont assez simples pour qu’un apprenti puisse les utiliser, d’autres sont si complexes que seuls les sorciers les plus puissants peuvent les lancer. Enfin, sachez que les sorts sont regroupés en différentes familles selon leur utilisation : les invocations, les rituels, les éphémères, les enchantements… Mais je vous expliquerai tout ça plus tard. D’accord ? »
Glok et Delana hochèrent la tête avec ferveur. Je ne les avais jamais connus aussi attentifs.
« Bien. Pour en revenir au mana, il en existe cinq types, émanant chacun d’un genre de terrain particulier. Puisque c’est l’une de mes deux couleurs de prédilection, je vous parlerai d’abord du blanc, qui est produit par les plaines, qu’elles soient arides et battues par les vents, ou couvertes de champs cultivés. Le mana blanc est celui de la guérison et de la protection, de la morale et de l’entraide, de la loi, de l’ordre et de la foi. Concrètement, la magie blanche est très utile pour se protéger, aussi bien contre les sorts agressifs que contre les créatures, et pour soigner blessures et maladies. De plus, elle permet de détruire enchantements et artefacts, ce qui est un atout précieux dont ne disposent pas toutes les couleurs. Les sorts blancs ne permettent pas d’attaquer directement un mage ennemi, mais peuvent gêner ou même tuer ses alliés et ses créatures. À l’inverse, les sorciers blancs ont de nombreux moyens d’aider leurs suivants lors d’un combat. C’est pourquoi ils s’entourent souvent de soldats disciplinés et courageux, et de sages clercs formés aux arts de la guérison. La magie blanche permet aussi d’appeler à soi de nombreux animaux des plaines, comme les chevaux, les oiseaux, les éléphants, ou même les lions. Quant aux créatures magiques que l’on peut invoquer grâce au mana blanc, il s’agit des griffons, des pégases, et surtout, des anges.
– En fait, la magie blanche est celle du Bien, n’est-ce pas ? fit Delana en souriant.
– Oui, le plus souvent : Serra, Orime la guérisseuse et son ami Cho-Manno sont des exemples parmi tant d’autres d’adeptes de la magie blanche dédiés au Bien. Mais poussées à l’extrême, les belles choses que sont la piété et l’ordre peuvent aussi mener au fanatisme et à la tyrannie. L’archange Radieuse, disciple de Serra, ou le Lieutenant Kirtar des avemains ont ainsi succombé à la folie du pouvoir et causé la mort de nombreux innocents… Et il existe aussi des sorts blancs terriblement puissants, capables de ravager un pays entier ! Voilà une chose que vous devez savoir dès maintenant : chaque type de magie peut être bonne ou mauvaise, tout dépend de la sagesse de celui qui l’utilise. »
Après mon exposé des bienfaits de la magie blanche, mais aussi de ses risques, Glok et Delana restèrent étonnamment pensifs. La magie est une arme à double tranchant, et je jugeai bon de les imprégner de cette idée avant même de débuter leur apprentissage. Je laissai mes deux élèves méditer cette vérité quelques instants, puis repris mon petit cours.
« Bon ! À présent, passons à la seconde couleur du pentagramme : le bleu », dis-je en indiquant la tapisserie ouvragée tendue au mur du laboratoire, sur laquelle étaient représentées cinq sphères colorées.
« Le mana bleu est l’essence magique de l’eau. Et bien que celle-ci soit présente un peu partout, seules les plus grandes étendues d’eau comme les lacs, les mers et les océans génèrent assez de mana bleu pour qu’un sorcier puisse l’utiliser. À l’image de l’élément qui la rend possible, la magie bleue est changeante, difficile à arrêter, et capable de créer de puissantes illusions.
– Maître, maître ! m’interrompit Glok en levant le doigt avec énergie. Les illusions, ça n’est pas réel, donc ça ne sert à rien !
– En es-tu bien sûr ? Pourtant, je me souviens d’une certaine fois où tu t’es jeté tout habillé dans la rivière parce que tu avais vu un anneau d’or briller au fond... Et tu es ressorti tout trempé avec un joli caillou dans la main !
– Oh oui, je me rappelle, tu avais l’air malin ! » lança Delana en éclatant de rire.
Glok se renfrogna en rougissant, ce qui chez nous gobelins se traduit par une teinte vert foncé.
« Ma douce Delana, repris-je d’un ton suave, j’ai pris cet exemple pour répondre à Glok, mais si tu y tiens je peux en trouver un autre dont tu es l’héroïne... »
Comme prévu, la fillette cessa aussitôt de rire de son petit camarade.
« Nous agissons en fonction de ce que nous voyons et entendons. Fais croire aux gens n’importe quoi, et il feront exactement ce que tu veux. »
Ma réponse plongea les enfants dans une intense réflexion et Glok gratta sa petite tête de gobelin de manière fort comique.
« Ça n’a pas l’air très… moral, intervint Delana.
– C’est vrai, mais là encore, tout dépend de tes motivations et de la façon dont tu t’y prends. Quoi qu’il en soit, le principal atout de la magie bleue est sa capacité inégalée à contrecarrer les sorts. À elle seule, cette possibilité fait des sorciers bleus des alliés précieux et des adversaires redoutés. Avantage durement gagné, car cette magie est particulièrement difficile à maîtriser, et requiert de vastes connaissances et des recherches poussées. Lors d’un affrontement entre sorciers, les sorts bleus sont très utiles pour gagner du temps, que ce soit en renvoyant d’où elles viennent les créatures invoquées par l’ennemi, ou en les fatiguant pour éviter qu’elles ne prennent part au combat. En revanche, la magie bleue est moins efficace que d’autres pour invoquer des créatures, et requiert plus de mana pour y parvenir. C’est pourquoi certains mages bleus préfèrent tout simplement prendre le contrôle des créatures de l’ennemi !
– Et quelles créatures peut-on appeler à soi grâce au bleu ? me demanda Delana en tortillant entre ses doigts une mèche de ses cheveux blonds.
– Toutes les créatures aquatiques, des petits poissons jusqu’aux gigantesques léviathans, les serpents de mer… et surtout les ondins, des humanoïdes dont le bas du corps ressemble à celui d’une anguille et qui habitent de vastes cités sous-marines. Le bleu permet également d’invoquer les créatures de l’air comme les oiseaux, les djinns et les drakôns. Les mages bleus sont d’ailleurs bien connus pour leur aptitude au vol et leur suprématie aérienne.
– Et les mages bleus sont-ils bons ? demanda Delana.
– Difficile de généraliser ! La plupart ne recherchent que la connaissance et sont de grands érudits, comme Barrin et sa femme Rayne de l’académie de Tolaria, d’autres sont des surdoués très satisfaits d’eux-mêmes, comme le prodige Ertaï. Malheureusement, certains sorciers bleus sont si avides de savoir qu’ils sont prêts à tout pour découvrir de nouveaux secrets, au mépris de l’éthique et de la vie des autres. Enfin, d’autres sont dévorés d’ambition et ne reculent devant aucune tromperie ou trahison pour acquérir toujours plus de pouvoir, comme le machiavélique ambassadeur ondin Laquatus et les dirigeants céphalides Aboshân et Llawan. Des exemples à ne pas suivre, mes enfants ! »
« Ça va, vous suivez ? » demandai-je deux apprentis en herbe qui acquiescèrent vivement, attendant la suite.
« Bien ! En poursuivant notre chemin sur le pentagramme des couleurs, nous rencontrons la magie noire. »
Sur la tapisserie, le cercle noir entouré de crânes et de démons semblait nous fixer, tel un gros œil ténébreux.
« Vous le savez, toute vie doit un jour se terminer. La mort est une étape nécessaire du cycle naturel, et c’est d’elle que la magie noire tire son énergie. Les plus grandes sources de mana noir sont les marais, où la décomposition végétale est très importante, mais il peut aussi émaner de sources moins naturelles telles que des terrains qui ont été pollués, ou de champs de bataille où de très nombreuses personnes ont trouvé la mort.
– Brr ! Ça n’a pas l’air d’être une magie très agréable, dit Delana.
– Non, en effet. Je vous ai dit que la magie peut être utilisée à différentes fins, selon la conscience de celui qui l’utilise. Eh bien, ce n’est pas vraiment le cas pour la magie noire, car la plupart de ses applications visent à affaiblir, empoisonner ou tuer.
– Maître ? demanda Delana en levant la main. Vous nous avez dit que la magie blanche aussi pouvait tuer.
– Oui, et si on tue des méchants, c’est bien, non ? reprit Glok avec pragmatisme.
– Hum ! Vaste débat que celui-là, mon petit Glok. Quoi qu’il en soit, le problème, c’est que le mana noir a une empreinte magique très particulière, qui corrompt ceux qui l’utilisent. Quand un sorcier se sert de magie noire pour tuer une créature ou un ennemi, il ressent au plus profond de son âme un plaisir pervers lié à un intense sentiment de puissance. Et bien vite, il prend goût à cette sensation, et il éprouve l’envie, puis le besoin, de faire d’autres victimes. Certains sorts noirs permettent de vampiriser l’énergie vitale de leur cible : ce genre de sort corrompt de façon irréversible l’âme de celui qui ose les lancer, le transformant en monstre avide de détruire toujours plus de vies.
– Mais c’est horrible ! s’écria Delana.
– Oui, et ce n’est pas le pire. La magie noire peut aussi ramener les morts à une parodie de vie, créant des êtres sans âme, les zombies, squelettes et autres morts-vivants. Il existe aussi de sombres rituels permettant d’invoquer de terribles démons et des légions de créatures maléfiques en tout genre. »
Au vu des mines apeurées de mes apprentis, je sus que j’avais réussi à leur donner un bon aperçu du côté sombre du pentagramme.
« Heureusement, la magie noire a aussi ses points faibles. Elle excelle pour détruire la vie, même magique, mais elle est impuissante face aux enchantements et aux artefacts inanimés. C’est donc avec ces armes qu’il faut se protéger des maléfices du mana noir.
– Mais… Pourquoi les gens pratiquent-ils la magie noire ? fit Delana d’un air triste.
– Oh, les causes ne manquent pas, répondis-je en soupirant. La plus fréquente est une soif de pouvoir liée à une fascination perverse pour la mort, mais cela peut être le désir de vengeance, comme pour Wöhlrajh, une malédiction, le désespoir, ou les deux comme pour Crovax, ou encore la folie, comme pour Chaînes ou Nattes. Il existe aussi des créatures pour lesquelles tuer son prochain est un acte anodin et normal. C’est le cas des Phyrexians, des êtres originaires d’un autre monde qui ont bien failli détruire le nôtre. Mais le mal est dans leur nature, et je crois qu’ils sont moins à blâmer que ceux qui renoncent volontairement à leur humanité pour le pouvoir. »
« Intéressons-nous à présent à la magie rouge, couleur particulièrement chère à mon vieux cœur de gobelin. »
Je fis apparaître une petite sphère enflammée dans ma main, et mes deux apprentis poussèrent à l’unisson un « Oh ! » d’émerveillement.
« La magie rouge est celle du feu et de la lave, de l’impulsivité et de la colère, dis-je en sentant la douce chaleur chauffer mon visage. Le mana rouge émane des montagnes, qu’il s’agisse de vieux massifs érodés par les âges ou de volcans impétueux. »
Tout en parlant, je jouais nonchalamment avec ma boule de feu… avant de m’apercevoir qu’elle monopolisait complètement l’attention des enfants. Je refermai brusquement la main et la sphère disparut, ce qui fit sursauter mes petits apprentis brutalement tirés de leur fascination.
« Si le cours ne vous intéresse pas, je peux arrêter tout de suite, dis-je d’un air sévère.
– Pardon, Maître Roldaïce, dit Delana avec de grands yeux destinés à m’attendrir.
– Mais le feu, c’est tellement chouette ! » lança Glok avec un grand sourire, nullement contrit par ma remarque.
Désarmé par leurs façons opposées mais efficaces de s’excuser, je poursuivis.
« Oui, c’est chouette, mais dangereux. La magie rouge permet de créer du feu, de la petite sphère que vous avez vue jusqu’à sa grande sœur capable d’embraser un village. Par le feu ou par la foudre, la magie des montagnes ne manque pas de moyens de roussir le derrière des ennemis pour leur apprendre à vivre, ou de condamner des innocents à une mort horrible, selon la moralité du sorcier qui l’utilise. Certains sorts peuvent ravager toute une région, que ce soit en faisant pleuvoir des pierres ou en provoquant des éruptions volcaniques ! Mais la magie rouge a aussi des applications moins cataclysmiques. Elle est très efficace pour détruire les artefacts, et de nombreux sorts et enchantements permettent à un sorcier rouge de conférer à ses alliés une vitesse et des réflexes surnaturels, les avantageant grandement au combat.
– Des alliés comme les gobelins ? demanda Glok.
– Oui, par exemple. Les sorciers rouges sont souvent belliqueux et ils aiment s’entourer de peuples des montagnes au tempérament sanguin comme les gobelins, les minotaures, les viashinos, les ogres, les barbares ou les nains. La magie rouge permet aussi d’invoquer des créatures imposantes : des dragons bien sûr, mais aussi des géants, et diverses créatures élémentales faites de feu, de roc ou d’éclairs.
– Mais alors, Maître, intervint Delana, si la magie rouge est destructrice et vouée à la guerre, les sorciers rouges sont plutôt méchants, non ?
– C’est malheureusement le cas de nombre d’entre eux. L’une des plus tristement connus pour ses actes de destruction est la terrible brigadière kelde Latulla. Mais il y a aussi des mages rouges qui utilisent leurs pouvoirs à bon escient, comme ceux qui se sont employés à combattre les Phyrexians quand ces créatures ont tenté d’envahir et de détruire notre monde.
– Comme vous, Maître Roldaïce ! fit Delana avec fierté.
– Hum… oui. Voyez-vous mes enfants, la magie est un don qui doit être employé pour améliorer la vie des gens et défendre ceux qui sont en danger, et pas pour semer le chaos et le malheur. Si seulement tout le monde pouvait être de cet avis ! »
« Nous arrivons maintenant à la dernière couleur du pentagramme magique, le vert. »
Mes apprentis tournèrent la tête vers la tapisserie, pour jeter un coup d’œil à la sphère d’émeraude entourée de broderies de feuilles, de fleurs et d’animaux.
« La magie verte tire son essence de la puissance brute de la nature et de la vie, et de leur incroyable capacité à renaître de leurs cendres. Le mana vert émane des forêts, qu’il s’agisse des bois de feuillus comme celui qui s’étend au sud du château, des jungles luxuriantes de Djamùraa ou de la Krosia, des collines couvertes de conifères de Cordell, ou de la forêt d’Argoth aux arbres millénaires et biscornus. Partout où les arbres règnent en maîtres et où la vie végétale foisonne, on trouve du mana vert en abondance.
Cette couleur de magie a de nombreuses applications, à commencer justement par une capacité inégalée à produire du mana. Un sorcier vert peut capter le mana provenant de terrains très éloignés, et même changer sa couleur. Un effet très pratique pour lancer des sorts de différentes couleurs, ou même multicolores !
– Maître ! Maître ! s’exclama Glok. Comment un sort peut-il être multicolore ?
– Patience, je vous en parlerai un peu plus tard. L’autre atout principal de la magie verte réside dans sa facilité à invoquer des créatures sauvages de toutes sortes. Des animaux comme les fauves, les serpents, les insectes, les singes, les éléphants ou les terribles guivres, et d’autres bêtes toutes plus étranges les unes que les autres. La vie végétale est également l’alliée des sorciers verts, qui peuvent stimuler et contrôler à leur guise la croissance des plantes pour se protéger de leurs ennemis ou les attaquer ! Sans oublier les sylvins, arbres animés capables de sortir de leur existence paisible pour se dresser contre les ennemis de la nature. La magie verte possède de nombreux points communs avec la blanche, et permet comme elle de détruire enchantements et artefacts, ce qui est un avantage majeur, mais également d’améliorer la vigueur des alliés d’un sorcier et de les soigner des pires blessures. Enfin, les mages verts peuvent contrôler les vents et déchaîner les tempêtes.
– Ça a l’air génial ! lança Glok.
– Oui, mais comme pour toute magie, obtenir ces pouvoirs requiert un certain engagement. Les sorciers noirs sacrifient leur âme, les bleus passent leur temps à étudier. Pour pratiquer la magie verte, il est nécessaire d’aimer sincèrement la nature, de la respecter et de la défendre. C’est pourquoi les mages verts ont de nombreux alliés parmi les défenseurs de la forêt : les elfes, voués corps et âme à la forêt et prêts à mourir pour elle, les fiers centaures, mi-humains mi-chevaux, et les nantukos, des insectes imposants et doués d’une grande sagesse. Chez tous ces peuples, ainsi que chez les humains, on trouve des druides, qui vouent un culte à la nature.
– Alors, contrairement aux sorciers noirs et rouges, les sorciers verts sont bienveillants, n’est-ce pas ? demanda Delana, décidément très désireuse de séparer les bons des méchants.
– Oui, c’est le cas de la plupart d’entre eux : Saule l’Automne, Kaysa, Multani et Molimo les maro-sorciers, le centaure Selton… Certains druides sont retranchés dans leur forêt et punissent quiconque y entre sans être invité, ce qui n’est guère sympathique, mais je ne connais aucun mage vert qui ait été maléfique. Car après tout, la loi de la nature est parfois cruelle, mais jamais mauvaise. »
Après avoir fait le tour des cinq couleurs de magie, je fis une pause et allai me servir une chope de liqueur de champignons, laissant mes apprentis méditer quelques instants sur ce qu’ils venaient d’apprendre.
« Comme je vous l’ai dit, repris-je, il est aussi possible de combiner plusieurs couleurs pour créer de nouveaux sorts. Un sort multicolore est plus complexe et plus difficile à lancer, et ses effets restent limités à ceux des couleurs de magie qui le composent. Par exemple, ni le noir ni le rouge ne peuvent détruire les enchantements, et un sort composé de magie rouge et noire ne peut donc pas le faire non plus. Pourtant, certains sorciers s’intéressent beaucoup aux sorts utilisant plusieurs couleurs, car ils permettent de combiner les forces de chacune d’elles, et donc d’obtenir des effets plus puissants. Mais peu importe, vous n’en êtes pas encore là. Encore une fois, la magie, c’est comme la cuisine : avant de tenter des mélanges, il faut d’abord savoir préparer les plats simples, ce qui n’est pas encore votre cas ! »
Je bus une gorgée de liqueur avant de poursuivre.
« Au début du cours, je vous ai également dit que la magie peut être utilisée de différentes façons : pour invoquer des créatures, pratiquer des rituels, créer des enchantements… Mais elle peut aussi être liée à la matière, pour fabriquer des objets magiques appelés artefacts. »
De la main, je montrai à mes apprentis le bric-à-brac régnant dans mon laboratoire. On pouvait y voir la table jonchée de grimoires et de baguettes, le ratelier d’armes hétéroclites ornant le mur nord, mon armure de combat inspirée de celle d’Urza, l’astrolabe placée devant la fenêtre, et bien d’autres trésors.
« L’art de la création d’artefacts n’est pas réservé à une couleur de magie, et tous les sorciers peuvent le pratiquer. De même, la plupart des objets qui nécessitent de l’énergie pour être activés fonctionnent avec n’importe quelle couleur de mana. Il existe une multitude d’artefacts : des talismans et des médaillons produisant du mana, des navires pour voyager dans les airs, des coupes capables de soigner ceux qui y boivent, mais aussi des armes magiques et des machines de guerre destructrices. Car si la magie peut être utilisée pour faire le bien comme le mal, c’est encore plus vrai en ce qui concerne les artefacts.
– Maître ? demanda Delana en levant la main. Un sorcier peut-il utiliser la magie des artefacts pour invoquer des créatures ?
– Non, mais il peut en fabriquer ! En façonnant un être inerte puis en lui insufflant une étincelle de vie magique, un sorcier peut créer toutes sortes de créatures artificielles. Les plus connues sont les golems, qui vont des simples hommes de sable ou de terre, capables d’accomplir des ordres simples, jusqu’aux plus élaborés doués d’une grande intelligence. Urza, le plus grand artificier de tous les temps, s’est jadis surpassé pour créer Karn, un golem d’argent doté de facultés magiques et d’une grande sensibilité, destiné à jouer un rôle central dans le combat d’Urza contre les Phyrexians. Pendant l’Apocalypse, je me suis d’ailleurs lié d’amitié avec lui, et vous le rencontrerez peut-être s’il vient me rendre visite un jour.
– Eh ben moi, ça me plairait bien de fabriquer des artefacts ! » dit Glok en grattant son petit menton d’un air inspiré, avant d’ajouter avec une mine réjouie : « Et puis faire de la magie rouge !
– Voilà qui n’étonne guère mon vieux cœur de gobelin, mon petit Glok. Et toi, Delana ?
– Hmm… Je crois que j’aimerais apprendre la magie blanche, Maître. Et aussi la verte.
– Un choix sage qui te correspond à merveille, jeune dame. Bien, bien, bien… »
Je vidai ma chope et la reposai sur la table, puis je joignis les mains devant mon visage en fixant mes apprentis d’un regard faussement songeur.
« Alors… Êtes-vous fatigués, ou voulez-vous que nous commencions tout de suite quelques travaux pratiques ? »
Les cris de joie assourdissants qui suivirent répondirent clairement à ma question.
Texte © P.O. Barome
Illustrations © Wizards of the Coast
Cette nouvelle a été écrite dans le but de présenter aux joueurs débutants les différentes couleurs de magie
représentées parmi les cartes Magic: the Gathering™.
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