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La nuit du sacrilège


Takeno, général samouraï
“ Takeno, général samouraï ”
par Matt Cavotta © Wizards of the Coast

Debout devant l’une des fenêtres de la salle du trône du Daimyo Konda, au sommet du château d’Eiganjo, le général Takeno contemplait les étendues mornes et désolées des plaines d’Araba. À perte de vue, ce n’étaient que terres dévastées et asséchées, criblées de cratères et tailladées de crevasses. Il n’en avait pas toujours été ainsi. Towabara était jadis une contrée prospère et verdoyante, avec ses champs et ses villages tranquilles. Partout dans le vaste royaume qu’avait bâti le Seigneur Konda, le peuple vivait en paix et en sécurité.


Hisoka, sensei de Minamo
“ Hisoka, sensei de Minamo ”
par Donato Giancola © Wizards of the Coast

Puis il y avait eu cette nuit. Takeno s’en souvenait encore parfaitement malgré les vingt ans qui s’étaient écoulés. Le rituel s’était déroulé dans cette même pièce, en présence du sorcier Hisoka, et de l’un de ces fourbes de soratami. Quand le sorcier eut terminé sa longue incantation, la fumée qui s’élevait des braises avait pris une teinte dorée et s’était condensée en un globe rayonnant d’une vive clarté, comme une ouverture vers un autre monde. Konda y avait plongé les mains, les yeux exorbités malgré l’aveuglante lumière, et en avait retiré un disque de pierre en fusion, dégageant une telle chaleur que les trois autres hommes avaient dû reculer.


Ce qui fut pris
“ Ce qui fut pris ”
par Adam Rex © Wizards of the Coast

Tandis qu’Hisoka dissipait la fumée dorée, le Daimyo s’était approché de l’autel préparé à cet effet et y avait placé le disque. L’objet était resté en suspension dans les airs, se refroidissant à vue d’œil en émettant force craquements et sifflements. Puis, une étrange lueur dans les yeux, Konda avait congédié Takeno, Hisoka et le soratami pour rester seul devant l’autel remplaçant désormais celui qui était dédié au Myojin du Feu Purificateur. Cette nuit-là, la favorite du Daimyo avait mis au monde celle qui serait sa fille unique, la princesse Michiko. Mais Konda avait été bien moins intéressé par sa paternité que par le rituel qu’il venait d’accomplir, et qui devait selon lui apporter gloire et paix éternelles à son royaume.

Château d’Eiganjo
“ Château d’Eiganjo ”
par Wayne England © Wizards of the Coast

L’avenir avait hélas prouvé le contraire. Au cours des mois qui avaient suivi, on avait assisté pour la première fois de l’histoire à des manifestations hostiles d’esprits, prenant forme dans le monde matériel et attaquant ceux qui leur rendaient hommage. Les plaines de Towabara avaient bien vite été ravagées, et Kamigawa était entré dans une ère de peur, apportée par ceux-là mêmes qui jadis lui apportaient l’espoir. Seul le château d’Eiganjo avait été épargné, et Takeno pensait savoir pourquoi.

Konda, seigneur d’Eiganjo
“ Konda, seigneur d’Eiganjo ”
par John Bolton © Wizards of the Coast

Un sifflement familier arracha le vieux samouraï au fil de ses pensées. Tournant la tête, il vit le Daimyo absorbé dans l’adoration de son autel. Flottant au-dessus de sa colonne, le disque de pierre s’était une fois de plus échauffé, sa chaleur troublant l’air environnant. Assis en tailleur au pied de l’autel, Konda fixait le disque, comme hypnotisé. Takeno regarda avec tristesse l’homme à qui il avait voué sa vie. Il avait été un seigneur éclairé, guidant son peuple avec force et sagesse, mais depuis cette nuit fatidique, il avait sombré dans la folie, se désintéressant de son royaume pour se dédier à son autel.
Quel qu’ait été le rituel accompli par Konda vingt ans plus tôt, Takeno était certain que c’était ce qui avait causé la colère des esprits et initié cette ère de malheur. Peut-être Konda avait-il emprisonné un kami dans ce disque, et que les autres cherchaient à le délivrer ? Peut-être aurait-il suffi de renverser cette colonne, de briser ce disque en morceaux pour que les kamis soient apaisés et que Kamigawa puisse revivre ?
Mais ces questions étaient vaines. Car tant qu’il vivrait, le général Takeno servirait fidèlement son Daimyo, même si celui-ci avait perdu la raison, et entraîné avec lui tout Kamigawa dans sa folie.



Lexique (cliquez sur le mot choisi pour revenir au texte)
Towabara (“Champs éternels”) : Nom donné aux immenses plaines de Kamigawa, que Konda parvint à unifier en un royaume unique.
Soratami (“Peuple du ciel”) : Humanoïdes à la peau d’un bleu très pâle et aux longues oreilles pendantes, aussi appelés lunaréens ou peuple de la lune. Gracieux et racés, les soratami sont des sorciers, des voyants et des sages. Ils forment un peuple très secret, et d’après la légende, ils vivent dans une merveilleuse cité cachée dans les nuages.
Myojin (“Brillante divinité”) : Au nombre de cinq, les myojins sont les plus puissants des esprits de Kamigawa, et incarnent chacun l’une des forces de ce monde : la justice, la connaissance, le pouvoir, la passion et la création.
Kami (“Esprit”) : Toute chose du monde matériel, de la plus infime à la plus vaste, correspond à un kami, qui est sa manifestation dans le monde spirituel.


Texte © P.O. Barome

Illustrations © Wizards of the Coast

Cette nouvelle est inspirée de la trilogie des romans officiels Magic: the Gathering du cycle Kamigawa™, par Scott McGough.

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